« La fusion du jazz et du funk était une évidence pour ces artistes pionniers afin qu’ils expriment leurs créativités festive de leur époque sans reniement des exigences de la technique ni même de l’âme jazz qui les envoûte»

BIO

Quincy Delight Jones, « Q » pour ses proches, est un testament vivant de l’évolution de la musique noire américaine de ces dernières décennies. Musicien, artiste, arrangeur et producteur, il a traversé les courants musicaux jazz, R&B, Bossa, fusion, funk et pop en y insufflant son emprunte indélébile faite d’expertise et d’innovation.

Quincy Jones est né dans la banlieue sud de Chicago en 1933 d’une mère brillante intellectuelle et musicienne et d’un père charpentier. Il a grandi avec son père et sa belle mère à Bremerton, en périphérie de Seattle. Il découvre la musique à l’école élémentaire et choisi de s’initier à la trompette. A 10 ans, il se lie d’amitié pour un garçon pianiste à peine plus âgé que lui : Ray Charles. Les deux amis forment un duo qui joue à l’occasion de mariages. A 18 ans, le jeune trompettiste obtient une bourse pour l’académie de musique de Berklee à Boston. Il abandonne son projet d’étude pour accompagner Lionel Hampton et sa formation dans une tournée. Il apprend de cette expérience les arrangements.

Il s’installe à New York et écrit pour les légendes du jazz ; Sarah Vaughan, Count Bassie, Duke Ellington, Dinah Washington et Ray Charles.En 1957, Q s’installe à Paris et étudie la composition classique avec Nadia Boulanger tout en travaillant pour un label français ; les Disques Barclay et la filiale française de Mercury records. Avec une formation de 18 musiciens qu’il enrôle, il fait une tournée européenne, puis américaine qui reçoit un accueille très enthousiaste. Des problèmes financiers obligent Q à retourner à New York pour servir comme directeur musical du label auquel il est redevable. En même temps, il se tourne vers la musique de film. Il signe la bande son de the pawn broker de Sydnet Lumet. A Los Angeles en 1972, ce seront the getaway de Sam Peckinpah et les séries de télévision l’homme de fer, le Bill Cosby show. En parallèle à cette activité, Q enregistre entre 1969 et 1974 une série d’album R&B, puis jazz fusion dont « walking in space » « you’ve got it bad girl » « body heat » avec des titres en tête des charts, une récolte de grammy Awards et un énorme succès commercial pour le dernier. L’élan est soudainement interrompu en août 1974, quand Q est frappé par une rupture d’anévrisme cérébral. Opéré deux fois, il est contraint au repos pendant six mois.

Q se remet au travail pour « mellow madness » et « I heard that ! ». En 1975, sa rencontre avec Chaka Khan dans un avion lui donne envie de travailler avec elle et son groupe Rufus. En 1978 elle interprète « stuff like that », titre R&B danse essentiel de son album « sounds ». La même année, il compose et produit la musique de la comédie musicale the wiz qui met en scène Diana Ross et Michael Jackson. En 1979, il réunit les musiciens de rufus et Michael Jackson pour « off the wall » et produit  « masterjam » de rufus and Chaka Khan. En 1981, son album « the Dude » est plusieurs fois disque de platine avec de multiples hits dont « just once », « Ai no corrida ». Il est couronnée de deux grammy awards. En 1982, il rejoint les studios pour un autre album de Michael Jackson : « thriller » qui sera le plus gros succès commercial de tous les temps.

L’année 1985 sera celle de la solidarité avec la chanson « we are the world » qu’il compose, produit et fait interpréter par un bataillon d’artistes au profit de l’œuvre humanitaire USA for AFRICA. Après une dernière collaboration avec Michael Jackson sur l’album « bad » en 1987, Q revient sur le devant de la scène musicale en 1989 avec un album solo « back on the block » qui réunit un parterre de musiciens et d’artistes d’hier et d’aujourd’hui pour un opus jazz pop, hip hop. C’est l’album de l’année 1990. Il faut attendre cinq ans pour qu’il nous livre un nouvel opus « Q’s Jook joint » qui recèle des reprises et rassemblent des artistes d’univers musicaux différents et de toutes générations.

Depuis Q est revenu à son amour pour le jazz et se plait à tourner avec son ami et complice de toujours Toots Thielemans dans les grands festivals mondiaux. Aujourd’hui la culture populaire américaine s’est approprié Quincy Jones, pas seulement pour les 26 grammy awards et ses 77 nominations, mais aussi pour l’histoire de sa vie qui passionne unanimement et qui fait de ce personnage une référence vivante pour plusieurs générations d’artistes.

Discographie principale

  • You've Got It Bad Girl (A&M 1973)
  • Body Heat (A&M 1974)
  • Mellow Madness (A&M 1975)
  • I Heard That! (A&M 1976)
  • Roots (A&M 1977)
  • ● ● / ● ● ●
  • The Color Purple film soundtrack (Qwest 1985)
  • Back On The Block (Qwest 1989)
  • Q's Jook Joint (Qwest 1995)
quincy jones - the dude

Mon avis : Comme producteur, Quincy sait toujours s’entourer de musiciens dont il sait que la griffe ou la patte correspond à l’image musicale d’un titre et à fortiori de l’album qu’il s’est mentalement construit comme projet. Comme arrangeur, il sait tirer la quintessence de ses musiciens par une alchimie complexe qu’il fait établir entre eux sur le plan artistique et humain. La force et l’intérêt de « the dude » est qu’il restitue la vision de son auteur sur la musique et son époque. Certes, Q emprunte des idées à d’autres ; par exemple les cuivres rappellent ceux de EWF, mais il les transforme en un concept général qui donne une profondeur à son album. « Ai no Corrida » est un titre disco funk mijoté pour les clubs, « just once » et « one hundred ways » sont des ballades romantiques californiennes, « velas » est un morceau de jazz fusion aérien et lumineux qui met en évidence le don de Toots pour l’harmonica. Le reste sont des morceaux rythmé funky qui n’ambitionnent pas de faire de danser mais de nous faire évader. C’est chose faite, merci Q.

quincy jones - back on the block
Face 1 Face 2
[Prologue (20’s rap)] [Jazz corner of the world]
Back on the block Birdland
I don’t go for that Septembro (brazilian wedding song)
I’ll be good to you One man woman
[The verb to be] Tomorrow
Wee B. doin’ it [Prelude to the garden]
The place you find love The secret garden (sweet seduction suite)

Mon avis : Q aborde la décennie qui vient comme une opportunité de réunir les artistes du moment et ceux d’hier. Le mélange des talents crée de l’inattendu et une alchimie subtile prend corps et sens au fur et à mesure de l’écoute de l’album et de la conscience du temps qui passe. Le contenu au funk dominant, ballade ou groove au tempo contemporain, renferme de véritable hymnes instrumentaux ou musicaux ; concept quincyjonesnien qui tend à sublimer les talents des artistes et musiciens en une émotion pure et partagée. Q met en ficelle sa musique en s’entourant d’artistes de prestige, des meilleurs talents du moment dans la catégorie rap, Hip, Hop  mais aussi des meilleurs musiciens jazz/funk de la côte Ouest. Le pudding improbable prend corps et joue, chante, ou rap à l’unisson d’une espérance universelle, celle de la transmission et de la transcendance. Le concept à un peu vieilli, mais l’idée reste séduisante. La mise en œuvre musicale est un trésor de subtilité et de complexité. Q demeure toujours inclassable.

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