Cheryl Ann Norton dit Cherrelle est l’autre pointure féminine du label de Clarence Avant Tabu du milieu des années 80. Avant de connaître un relatif succès en solo ou en duo avec Alexander O’Neal, elle avait tourné avec Michael Henderson et Luther Vandross après s’être faite remarqué par ce premier dès 1977, elle avait alors 19 ans. Une demo enregistrée par elle et envoyé à Tabu attire l’attention de Clarence Avant, président du label qui la fait signer en 1983. En 1984, sous la supervision de Jimmy Jam & Terry Lewis, elle enregistre son première album : « fragile » en majeur partie produit par Flyte Time. Le titre « I didn’t mean to turn you on » se classe 8ème dans les charts US dans la catégorie R&B et 6ème dans la catégorie danse. L’album sera 27ème des vente dans la catégorie US R&B. L’album suivant « high priority » propulse le titre « Saturday night » en duo avec Alexander O’Neal 2nd dans les charts US, l’album est disque d’or. Un marketing réussi construit autour de la beauté froide et la plastique de Cherrelle, plus une production musicale virile qui contraste avec sa voix juvénile et sensuelle en font un coup remarquable pour le tandem Jam/Lewis. Pour le 3ème album « affair » en 1988, Jam & Lewis oriente le contenu musical vers le même concept que pour l’album « hearsay » de O’Neal ; de jolies ballades sirupeuses et romantiques sur des textes plus féministes émancipent davantage Cherrelle dont l’image glamour séduit. le titre « everything I miss at home », un quasi duo avec O’Neal, est n°1 ! L’album suivant « the woman that I am » n’est plus griffé Jam & Lewis mais est marqué par la collaboration avec Narada Michael Walden sur trois titres. Il n’aura pas l’impact des précédents.
Cherrelle a épousé l’évolution d’un style de musique en même temps qu’elle a fait évoluer son image en tenant compte des changements dans la représentation de la beauté noire dans la société américaine. On pourra dire que c’est un bon coup marketing ou un fait d’artistes selon le point de vu, il nous reste les albums pour le vérifier.

Mon avis : « high priority » est album atypique dans la production funk US de 1985, mais il est aussi un bon exemple du son de Minneapolis à la fois groove décalé très électro et verve joyeuse au son brut anti-sentimental mais arrondi pour cet album. « Saturday love » mi tempo appuyé et réverbérations, est une concession à la R&B du moment par une mélodie romantique qui peut être dansé langoureusement. Bien qu’électro, les autres titres sonnent âpre ou demeurent des grooves tranchants, exemples : « you look good to me », « artificial heart ». L’album le plus personnalisé et le plus original de Cherrelle qui montre une facette rugueuse de sa personnalité, mais aussi une progression dans l'originalité des productions Jam&Lewis qui sera confirmée par la suite.