Co-fondateur de Laface records avec Antonio L.A Reid, Kenny “Babyface” Edmonds est un producteur /arrangeur/compositeur très prolifique durant la décennie 90 qui a accroché les trophées des plus grands artistes de son époque, il est aussi celui qui a révolutionné le son R&B avec sa “westcoast hip hop/swing touch“ et ce dès la fin décennie 80 qui la tant nourri musicalement. Un des rares artistes issus du label Solar qu’il n’a pu sauver du déclin, avant qu’il ne soit racheté par Epic, en débit de certaines étincelles, on se souvient tous du tonitruant « rock steady » des Whispers.

Ce natif d’Indianapolis (OHIO) a fourbi ses premiers armes comme musicien multi taches avec son groupe THE DEELE pour 3 albums chez Solar entre 1983 et 1987. Cette formation dans le sillage artistique de MIDNIGHT STAR ne brille pas par son originalité et la qualité de ses compositions, mais le label au macaron stellaire qui a besoin de sang neuf pour renouveler son répertoire lui confie la réalisation et la co-production avec L.A. Reid de « lovers » son 1^er album solo. Bien que n’ayant figuré que dans les profondeurs des « charts », « lovers » révèle un talent artistique latent et une dextérité de programmation sans faille.

En 1989, c’est « tender lovers », son 2^ème album solo, qui lui apportera une reconnaissance critique et commerciale, puis de nombreuses récompenses dont celles de la meilleure performance vocale et instrumentale dans la catégorie R&B et celle de producteur de l’année avec L.A. Reid. Tout en poursuivant la production avec LaFace records, son nouveau label, pour de nombreux artistes de la scène R&B (Whitney Houston, Karyn White, Paula Abdul…) New Jack (Bobby Brown, Tony Braxton…), Babyface revient en 1993 avec “for the cool in you” un remake encore plus abouti de ce qui lui jusqu’à présent bien réussi, une face mellow mood sentimentale et une face hip hop du meilleur effet, l’album est disque d’or et disque de platine. Dorénavant BabyFace est le producteur le plus demandé dans l’industrie, il signe des titres pour les plus grands ; Madonna, Céline Dion, Janet Jackson… tout en se maintenant dans le bain de la new R&B pour lequel il sera tout autant créatif et prolifique. Babyface s’efface progressivement de la scène pendant la décennie suivante, sans jamais tout à fait disparaître. Il est à présent considéré comme une légende de la R&B et son répertoire personnel n’a jamais trahi la matrice qui la forgé musicalement.

Mon avis : Babyface renouvelle le genre de la R&B par une nouvelle approche dans la composition, plutôt que aller vers la sophistication instrumentale et technique, il s’entoure d’une équipe réduite de partenaires plus touche à tout que musiciens experts pour mettre en musique une inspiration collective rajeunie pour un son plus urbain, rationalisé mais esthétique. Il contourne le piège de la soupe westcoast aux « reverbes et strates » trop entendu pour aller à l’essentiel ; des mélodies sentimentales aux accents de plages et d’intrigues post ado. La programmation varie peu d’un titre à l’autre, mais les mélodies s’enchainent en se confondant dans une tonalité électrique soft mais avec un sens de l’harmonie, voir avec une étrange douceur surtout sur les titres de la face 2 dévolue aux ballades.

La face 1 est moins originale après coup, la programmation batterie manque un peu punch et les mélodies sont un peu confuses. Non, Babyface n’est pas un cogneur, mais un artiste plus soft dont on sent dans ses entrailles une inspiration R&B authentique.  

Mon avis : Excellent album de westcoast très consensuel qui mise sur une orchestration académique jamais pris en défaut à la limite de la pop et du R&B. La neutralité de l’enregistrement met en valeur les choix de composition mélodiques aux accents de funk mais tenté par la new jack swing sur les titres rythmés ; « serves you right », « tell me » et « round and round ». Les ballades très calmement initiées au piano acoustique reposent sur une orchestration proche du folk californien. Ce choix de production qui permet de toucher un public plus large en prenant peu de risque musicalement est gagné commercialement mais il peut laisser sur leur faim ceux qui souhaite être surpris. En tous cas, la qualité réside ici et les modes passent.